Trop c'est trop ! Aussi vrai que je ne demandais pas mieux que de faire confiance, là je craquais. Pour la première fois.
- Alors, qui va me dire exactement ce qui se passe ici ?! Demandai-je d'un ton agacé.
Personne pour me répondre ??? D'abord, on me téléporte à moitié mort, dans ce royaume peuplé d'anges et de créatures fantastiques. Ensuite, je suis sauvé juste avant le trépas, par un rituel qui efface ma mémoire ! On m'apprend alors que je suis un héros prophétique qui doit sauver ce monde et l'univers entier. Rien que ça… Puis j'ai le plaisir de découvrir qu'un des mes compagnons de route est un dragon nain antipathique !
- Dragalion, pas dragon nain, rétorqua Déziel
- Si tu veux ! Ensuite on m'emmène à la rencontre d'une prophétesse…
- Poétesse, précisa Déziel
- Oui, bon… Celle-ci, sensée me livrer des révélations me concernant, me récite un poème incompréhensible, avant de se faire tuer sous mes yeux par un archange, dont l'escadron tentera de nous capturer avant de se faire décimer entièrement par des vampires …
- Des feralis, grommela le dragalion.
- Cesse de m'interrompre ! J'en ai marre qu'on me dise ce que je dois dire, ce que je dois faire ! Trop de questions laissées en suspend, et des réponses trop floues !!! C'est ainsi depuis le début ! Ok, je suis un novice ici, et je ne connais
rien de vos vies, de vos règles ! Mais comment voulez-vous que je fasse si on ne me dit si peu de choses !! Je ne suis pas un pantin, et je refuse d'en être un ! J'ai eu confiance en Sally dès notre rencontre. Mais là, trop c'est trop ! Hors de question que ce vieil homme, sorti de nulle part, me donne des ordres !
- Tout d'abord, mon nom est Victor. Ensuite, jeune homme, je ne vous donne aucun ordre, mais un conseil. Vous l'avez dit parfaitement vous-même : vous ne savez rien. Mais je veux bien vous donner les informations dont vous avez besoin, a présent que les feralis sont partis, et que nous sommes hors de danger.
- Le problème, c'est que je dois croire en vous, que je ne connais pas ! Et la confiance ne se donne pas à tout le monde ! En plus, elle s'installe avec le temps…
- Là est le problème, mon prince, répondit Sally. Nous manquons de temps. Sanctuary, le château du royaume, a été prit d'assaut par les archanges. Dieu merci, ils ne peuvent pénétrer dans la salle du trône sans l'épée de Cléador. Mais combien de temps encore, avant qu'ils ne retrouvent l'épée ??
- Cléador, Sanctuary, la prophétie… Comment savoir si ceci n'est pas un tissu de mensonge ?!?
- Oh, mon prince, je crois que Lerival a réussi son coup… Il a semé le doute dans votre esprit et je ne sais que dire pour vous prouver que je suis sincère, dit l'ange blond avec détresse dans les yeux.
- Lerival a dit que je n'étais que l'instrument de votre vengeance, Sally. Je ne veux pas le croire. Mais ses mots raisonnent dans ma tête, et je n'arrive pas à les chasser…
- C'est là tout son pouvoir, ajouta Victor. Et cela va au-delà de la simple manipulation verbale. Je ne suis pas de taille à lutter contre un manipulateur
de cette envergure ; et je ne suis pas en mesure de confirmer ou démentir la validité de vos doutes concernant Sally. Je peux juste vous dire ce que je sais. Asseyons-nous un instant, et prenons le temps de parler.
- Oui ! Parlez-moi de la prophétie, et de ce mal qui a prit possession des archanges… J'ai besoin de comprendre.
- Tout d'abord, je vais vous raconter le peu que nous savons sur l'origine de notre monde… Il y a très longtemps, toutes les créatures d'Arthelius vivaient en harmonie. Il n'y avait ni violence, ni guerre. Anges et archanges vivaient en paix, jusqu'à la rupture originelle.
- La rupture ?
- Un mal qui a surgit, dont on sait où. Une sorte de haine et violence qui se propageait sournoisement. Naguère terre d'amour et de paix, Arthelius devenait peu à peu une terre de désolation. Les anges et archanges s'entretuaient…
L'espoir, le rêve, disparaissaient. La fin semblait inévitable. Peut-être aurait-ce été mieux ainsi… Le sort en était jeté. Jusqu'à l'arrivée du premier être humain à Arthelius. Il fut le providentiel sauveur de ce monde. Nulle ne sait comment et
en combien de temps il a vaincu le mal. Mais l'essentiel, c'est qu'il avait rétabli la paix en nos terres, même si celles-ci étaient à jamais transformées. Arthelius portait les stigmates et les cicatrices de cette folie, de cette guerre passée.
Trop nombreuses étaient les victimes et les souffrances… Honteux et repentis de leurs comportements, les anges et archanges invoquèrent un sorcier puissant, qui via une formule magique, leur interdisait et empêchait de s'entretuer. Le sorcier s'exécuta. Une fois le sort lancé, constat fut que le sorcier avait réussi la mission qui lui était demandée. En contrepartie, les archanges lui offrirent de vastes terres. Quant à l'homme, à l'aide des anges et des mages, il entreprit de
bâtir Sanctuary, un Château gigantesque, qui devint le sanctuaire de toute créature vivante. Là où nous trouvons la paix, le repos, les soins et
l'amour dont nous avons tous besoin. Emprunt de magie et de mystères, la salle du trône renferme un pouvoir inimaginable. Sa mission accomplie, l'homme souhaita retourner sur terre, parmi les siens. Les anges demandèrent néanmoins
à cet homme de rester en ce royaume. Ils redoutaient que le mal puisse se réveiller, une fois leur sauveur parti. A contre coeur, cet homme devint le tout premier roi d'Arthelius. Il hérita d'un pouvoir qu'il n'avait jamais voulu.
Ainsi commença la légende qui veut que le pouvoir soit donné seulement à celui qui ne le veut ou ne le recherche pas… C'est ainsi qu'Arthelius pouvait renaître de ses cendres et prospérer sereinement. Jusqu'au jour où les mages du
royaume firent une découverte surprenante. Un livre, vieux, plus vieux encore que l'écriture angélique. Les mages mirent des années à en déchiffrer une petite partie. Avec stupeurs, ils comprirent que ce livre détenait les clefs de
l'avenir. Tout ce qui s'était passé jusqu'à présent était écrit : Le réveil du mal, l'arrivée d'un sauveur humain, la construction de Sanctuary. Tout y était inscrit, ainsi qu'une prophétie terrible, qui parle de la fin du monde et de tout ce qui vit, le
jour où un archange prendra les commandes du royaume. Le premier roi, sensible à ce danger potentiel, fit condamner les fenêtres de la salle du trône. Il y ajouta deux portes immenses, qui sont le seul moyen d'y accéder. Les portes, ont
été construites du métal le plus résistant que l'on peut trouver ici. Renforcées par un rituel magique, seule l'épée de Cléador peut les ouvrir. Des siècles se sont écoulés depuis cette histoire. Malheureusement, les archanges ont la mémoire
courte, et la nouvelle génération semble ignorer cette souffrance passée. L'histoire se répète. Le mal semble s'être réveillé depuis la disparition de votre père, le dernier roi en date.
- Mon père…
Ce mot n'évoquait aucun souvenir, ce qui était tristement normal. Mais j'espérais au fond de moi ressentir au moins un je ne sais quoi de tristesse ou de
nostalgie. Au pire de la colère. Mais le pire, ce n'était pas de la colère. Le pire, c'était le vide. Le rien. Aucune émotion. Plus que jamais, je me sentais
comme une coquille vide ; Comme un objet pratique qu'on utilise à sa guise. Comme l'instrument… d'une vengeance ? Et si Lerival disait vrai ? Grand Dieu, non ! Je m'étais promis de croire en Sally, mais ce doute était là, bousculant mes
pensées, narguant ma raison… J'aurais tant voulu oublier ces mots… Je me forçais à reprendre le fil de la discussion….
- Mon père… Parlez-moi de lui ! Vous avez dit l'avoir entraîné jadis !
- Votre père, Phileas, est un homme bon.
Raisonnablement bon. Généreux, dévoué. On ne lui connaît que des qualités. Tout comme ses prédécesseurs, il a su régner en toute humilité et succès, jusqu'à sa disparition…
Victor parlait de mon père avec tant d'éloge. Etait ce là la réalité de l'histoire, ou bien l'élan de respect nouveau que suscitent les morts, à qui l'on doit le plus grand hommage, même s'ils se sont comportés comme des monstres lors de leur vivant ? Les paroles du vieil homme avaient un arrière goût d'éloges funèbres.
- J'étais son maître d'arme, au tout début de son règne. Tout comme vous, il ignorait les règles de ce monde et l'art du combat. Je lui ai enseigné tout
ce que je savais, et aujourd'hui, c'est à votre tour ! Mais pour cela, il nous faut quitter la montagne, pour rejoindre ma demeure qui se trouve à une
journée d'ici... Nous y trouverons tout ce dont nous avons besoin.
Le vieil homme avait raison. La poétesse étant morte, son livre des révélations étant détruit, nous étions revenus à la case de départ. Nous n'avions
plus rien à faire ici.
- Très bien Victor. Si Sally & Déziel sont d'accords, je suis prêt à aller chez vous, pour suivre cet… entraînement !
LE LENDEMAIN
La maison de Victor était assez reculée de tout. On apercevait ici et là d'autres habitations, mais dans sa globalité, on peut dire qu'il ne manquait pas d'espace vital. De bois et de pierre, la façade était d'une banalité formidable. Qui aurait
pu penser un instant que la demeure cachait une salle d'entraînement, munie d'un véritable arsenal. Arcs, arbalètes, pistolets, masses, couteaux, sabres. Je faisais l'inventaire rapide de ce que j'apercevais. Il y avait même des armes que je n'aurai pas su identifier.
- Waow ! On peut dire que vous avez de quoi faire !
- J'ai quitté ma fonction de maître d'armes, il y a quelques années. Mais
ma fonction ne m'a pas quitté, dit-il d'un air léger. On ne se refait pas. Surtout à
mon âge. Mon garçon, passons aux choses sérieuses. Tout d'abord, il va falloir que vous appreniez à vous faire choisir !
- Pardon ???
- Oui, contrairement à ce que l'on croit, on ne fait pas tant de choix dans cette vie. Et en ce qui concerne cet entraînement, la règle est sensiblement la même. Nous avons tous des dons. Certains pour le dessin, d'autres la musique. En ce qui vous
concerne, la question est de découvrir l'instrument avec lequel vous avez le plus d'affinité. Vous n'avez pas vraiment choisit votre arme, lors de votre combat
contre l'escadron. L'arc fut un choix par défaut. Par manque d'option. L'histoire a parlé. Vous n'êtes pas fait pour cette arme, tout comme votre père d'ailleurs.
Sally m'observait avec tendresse. Elle me lança un sourire discret. Discrétion qui pourtant n'échappa guère à Victor.
- Amor vincit omnia, me dit-il
- Qu'est-ce que cela signifie ? demandais-je. Ce n'était pas la première fois que l'homme s'adressait à nous en latin. Je devinais une certaine érudition de ce personnage haut en couleur.
- Vous le saurez assez vite dit-il, d'un air complice. Bon, nous allons commencer par l'épée. Phileas appréciait particulièrement cette arme de proximité.
Imposante et écrasante. Cela lui allait bien. Pendant plus d'une heure, Victor m'enseigna le port de l'arme. La maniement. Les coups, et les gestes
qui protègent, ceux qui blessent. Ceux qui tuent… Satisfait de cette première approche, le vieil homme suggéra de passer à une autre arme.
- Sally, pouvez-vous chercher la dague, qui se trouve dans le grand coffre, qui se trouve à l'autre bout de la salle ? demanda-t-il.
Sans même répondre, l'Ange s'envola. La salle était certes immense, le coffre assez loin, mais je crois que tout prétexte était bon pour prendre son
envol. Sally aimait voler. Plus encore, elle en avait un besoin fou. Mon sang se glaçait alors qu'elle se mit à soulever le couvercle du coffre. Sally y plongea
sa main avant de pousser un cri terrifiant, amplifié par l'écho de la pièce. La belle Sally recula tout en essayant de prendre son envol, avant de retomber aussitôt. Suivi de Déziel et de Victor, je me précipitais vers elle. Que la distance entre nous
semblait grande. Des sentiments chaotiques traversaient mon esprit. Le principal étant le remord.
- Humpf ! Elle s'est fait mordre par un viralien !
Le dragalion se jeta sur cette petite créature visqueuse qui venait d'attaquer Sally. Plusieurs coup de gueules saccadés précédèrent une mise à mort rapide et sans appel. Comme à son habitude, en cas de danger, le dragalion faisait preuve d'une
férocité surprenante.
- Sally, Sally… parlez-moi…
L'ange blond se tordait de douleur. Ses doigts se crispaient… De sa bouche quelques étoiles sortaient de façon anarchique. Essayait-elle de se soigner, utilisant le même rituel qui m'avait sauvé la vie ?
- Courage Sally…
- Humpf… Nous ne pouvons rien faire pour l'instant. Le venin du viralien a déjà commencé son effet. Elle n'est même plus assez forte pour tenter de renverser le processus. L'infection a commencé…
Le vieil homme enleva sa veste de velours, et la plaça, tel un oreiller, sous la
tête de Sally.
- Effectivement, il n'y a plus grand chose à faire.
- Oui. Sally va mourir… Dit le dragalion, totalement imperturbable.
- Comment ? Non ! C'est impossible. Je croyais que… Ce n'est pas vrai Déziel !!! lui dis-je, plus que jamais paniqué.
- Humpf… Le venin du viralien transmet un virus qui se propage très rapidement. Les conséquences en sont une fièvre délirante, très forte, parfois fatale. Si Sally y survit, une paralysie sournoise s'emparera de ses membres, avant d'être totale. Ensuite les fonctions vitales seront touchées. Le coeur en dernier… Dans un dernier souffle, elle nous quittera à jamais.
- NON !!! hurlai-je, en précipitant sur Victor. Vous le saviez n'est-ce pas ! Vous le saviez !!! Je vais vous tuer sale traître !
- Comment aurai-je pu savoir qu'un viralien se cachait dans ce coffre, demanda-t-il judicieusement. Je ne le savais pas. Pas plus que vous, n'est ce pas ?
Le dragalion nous lança un regard suspicieux…
Quant à moi, je ne savais que répondre. Mon attention se recentra sur la pauvre Sally. Ma belle Sally. Les larmes commençaient à troubler
ma vue.
- Tenez-bon Sally. Je vous en supplie, il faut que teniez bon. Que vais-je faire si vous mourrez ? Je vous en prie, ne me laissez pas seul. Ne me laissez pas dans ce monde de fous… L'ange blond, sous l'influence de la fièvre, se mit à parler de façon incohérente.
- Je… Cléador. Hummm… Non… ceeee… monph…reeer…
- Oh… Sally, que voulez vous me dire?...
Je me tournais vers le dragalion. Déziel, est ce du latin ? De L'angélique ???
La belle me regardait avec ce regard, remplit de désespoir. Elle plaça son index sur ma bouche, pour me taire…
- …éeerkiacoo…meen… Cé laa guerrrre!
Le front de Sally était brûlant. La fièvre devint plus forte encore. Il fallait à tout prix réagir !
- Bon sang, il nous faut de la glace !!! Que quelqu'un aille chercher de la glace !
- Nous n'en avons pas ici. On peut en trouver à Frosine, mais c'est à 3 jours d'ici. Il sera bien trop tard, dit le vieil homme.
- De l'eau fraîche. Victor, trouvez-moi de l'eau fraîche. Tout de suite !!! Déziel, toi, bats des ailes afin de refroidir l'air autour d'elle…
- Mooon… Prince… Des douuutes… Nooon… - Chut, Sally, épargnez vos forces ; Vous devez survivre à cette fièvre…
- Jeee ne… neeee vouus ai jam…ais mentii… Aces mots, j'éclatais en sanglot…
- Pardon Sally. Pardon d'avoir douté de vous. Pardon de ne pas avoir été assez fort… pardon d'avoir permis à Lerival de semer le doute entre nous… pardon, Sally… pardon… pardon… Victor revint sans eau. Il ne m'en fallut pas plus
pour me jeter sur lui, la rage au coeur…
- C'est sa mort que vous voulez n'est-ce pas !! Qui êtes-vous ! Que voulez-vous vieil homme !
- Ne dites pas n'importe quoi. Je suis venu vous dire que j'ai fait couler un bain d'eau froide, et qu'il fallait l'y emmener immédiatement. Le bain fit son effet. La fièvre tombait peu à peu.
- Vous allez déjà mieux, mon ange. Si l'eau fraîche vous a fait du bien, je sais au fond de moi que vous vous êtes battue de toutes vos
forces pour survivre…
- Oui.. Mais… mais quel intérêt de survivre, pour si peu de temps. La paralysie me guette, et elle est sans merci, répondit-elle.
- Que ce soit une heure, ou une journée, je vous veux en vie, car je garde l'espoir. Il doit bien exister un antidote…
- Oui, il en existe un. Mais sa préparation requière de nombreuses herbes et autres ingrédients. Et quand bien même, l'antidote demande plusieurs jours de préparation. Il sera trop tard de toute façon, confessa Victor.
- Humpf… Il reste une alternative. A Sanctuary, nous avons une salle de soin. On y
trouve tous les antidotes et potions connues à ce jour. De mémoire, il reste une dizaine de fiole dans les stocks.
- Non ! chuchota Sally. Vous ne pouvez aller là bas. Le château est envahit par les archanges. Nous n'avons aucune chance.
- Tant qu'il y a de la vie, j'ai de l'espoir Sally. Nous irons à Sanctuary ensembles. Et vous en sortirez guérie ! Ne perdons pas un instant !
- Je vous accompagne, dit le vieil homme.
- C'est hors de question !
- Humpf, ouvrez les yeux : Victor ne sera pas de trop contre une armée d'archanges !
- Déziel, je sais ce que je dis. On ne peut pas avoir confiance en lui !
- Mais..
- Ca suffit Déziel ! J'ai mes raisons. Victor restera ici. Quant à nous, préparons nos
armes, et partons. Chaque minute compte et peut faire la différence. Je me surprenais moi-même, face à cette détermination nouvelle. J'avais fait une erreur. Je devais la réparer, et personne ne pouvait se mettre entre moi, et ma décision.
FLASH-BACK :
LA VEILLE.
- Très bien Victor. Si Sally & Déziel sont d'accords, je suis prêt à aller chez vous,
pour suivre cet… entraînement !
- Sage décision jeune homme ! Vous ne le regretterez pas ! Autant nous mettre en route tout de suite, long est le chemin. Sally, en tant qu'ange, votre vue a une portée exceptionnelle. Pouvez-vous faire un tour de reconnaissance ?
- Sally reste avec nous ! On ne sépare pas !
- Humpf, je peux l'accompagner. J'ai toujours protégé Sally, en quoi cela changerait aujourd'hui ?
Résigné, j'acceptais de voir l'ange blond prendre son envol. Dès qu'elle s'éloignait de moi, une angoisse irrationnelle s'emparait de tout mon être. J'étais terrifié à l'idée qu'elle ne revienne pas, et que je la perde à jamais.
- Vous l'aimez n'est-ce pas ? demanda le vieil homme.
- Est-ce si évident ?
- Il y a des signes qui ne trompent pas. Mais faîtes attention. Dans ce royaume, l'amour entre un ange et un humain est interdit. Si vous deviez défier, envers et contre tous, les lois de ce monde, assurez-vous d'abord que cet amour est réel et réciproque…
- Je crois que je l'aime. Je n'arrive pas à m'expliquer comment et pourquoi. M'a-t-elle envoûté, hypnotisé, lavé le cerveau ?? ? Je n'ai aucune réponse, juste des questions. Et c'est encore plus compliqué, depuis que Lerival a semé le doute
dans mon esprit. Je m'efforce chaque instant de croire en la sincérité de Sally. Je veux la croire. Mais la pensé qu'elle m'utilise peutêtre comme un instrument de sa vengeance contre Lerival m'obsède de plus en plus.
- Ne vous laissez pas ronger par le doute. Lerival est un virtuose dans ce domaine. Je ne connais pas Sally. Je ne peux pas répondre pour elle. Par contre, je connais un moyen de révéler la vérité. Il existe une créature dont le venin agit comme un sérum de vérité. Il provoque un peu de fièvre, mais cela est sans danger. Si vous l'acceptez, je peux m'arranger pour que Sally se fasse mordre demain, pendant l'entraînement.
- C'est odieux ! Je ne peux pas accepter cela.
- Aux grands maux les grands remèdes. Le doute que Lerival a semé dans votre tête, est un doute surnaturel, mystique et irrationnel. Ce doute risque de vous détruire si vous ne faites rien. Vous détruire vous, mais elle aussi. Alors, si le
procédé vous semble odieux, souvenez-vous que c'est une pour une bonne cause.
- C'est sans danger, vous êtes certain ?
- Je vous l'assure.
RETOUR AU PRÉSENT.
DANS LES PROFONDEURS DES
ENTRAILLES D'ARTHELIUS
- J'espère que vous êtes satisfait, dit Victor, avec une aigreur dans la voix. Le prince, Sally et Déziel sont partis en direction du château…
- Satisfait ? Bien plus que satisfait, je suis aux anges ! Si je me peux me permettre cette expression, moi, le maître des ténèbres de ce royaume, dit Lerival en riant. Cet idiot de prince est tombé dans le piège que je lui ai tendu. Il n'est pas très malin cela dit…
- Que voulez-vous dire, demanda Victor.
- Vous surgissez de nulle part, en pleine nuit, dans une montagne inhabitée. Sans abris. Vous apparaissez, comme si de rien n'était, alors que ma troupe de feralis venait de massacrer un escadron d'archange, et ce Prince ne se pose aucune question !!! En temps normal, personne n'oserait s'aventurer sur la montagne blanche, surtout de pleine nuit ! Si vous n'étiez pas l'instrument de mon plan
machiavélique, vous n'auriez pas survécu. Il aurait dû se poser les bonnes questions.
- Profitez bien de son manque d'expérience, Lerival ! Cela ne durera pas. D'après c'est que j'ai vu de l'entraînement, le prince a hérité du potentiel de son père. Il le surpasse même. En peu de temps, il a fait plus de progrès que Phileas en une semaine. Ne le sous estimez pas. Il risque bien de devenir un ennemi de taille. Et peut-être enfin serons-nous débarrassé à jamais de vous !!! dit le vieil homme avec hargne.
- Ah ah ah… J'adore cette haine que vous avez envers moi. Vous, jadis si fier, si noble, contraint à servir le maître du mensonge. Vous, ami du roi, réduit à l'état de marionnette, dont je tire une à une les ficelles.
- Je ne peux vous tuer Lerival, mais je prierai chaque instant de ma vie, pour que le prince y parvienne.
- Rassurez-vous, je compte bien survivre… C'est pour cela que je lui ai tendu ce piège. Nous voici, lui et moi, liés par cet affreux mensonge ! C'est un secret inavouable : il a non seulement mit la vie de Sally en danger, de surcroît par un
procédé lamentable, mais pour finir, il lui cache cette vérité... Je me réjouis d'avance du plaisir que je prendrai, à voir le visage de la pauvre Sally se décomposer, lorsqu'elle apprendra ce que son beau Prince a fait. Amor vincit omni, avez-vous dit… " L'amour vainc tout ". Mais cela m'étonnerait que leur amour survive à ce mensonge. Aussi entraîné, aussi fort deviendra-t-il, le prince n'aura qu'une faiblesse : son amour pour Sally. Et je compte bien garder cette carte, le jour où lui et moi devrons nous affronter à nouveau ! Et ce jour là,
le prince ne s'en relèvera pas…
- Pour cela, il faudrait d'abord que Sally survive à la morsure du viralien.
- Et c'est moi qui sous estime le prince ? Il obtiendra l'antidote à Sanctuary. Mais… il ignore qu'une double surprise l'y attend ! Le prince des hommes va tomber de haut. Et je savoure déjà sa chute…